Sénégal – Quand les influenceurs font de l’ombre aux médias traditionnels
1 mars 2022L’événement des réseaux sociaux a donné naissance à une nouvelle génération d’acteurs du web surnommés «Influenceurs». Depuis un certain temps, ces stars des réseaux sociaux ( tiktokeurs, swap-chateurs, comédiens..) volent la vedette aux médias traditionnels.
Lors de la dernière coupe d’Afrique des nations de Football remportée par le Sénégal et récemment lors de l’inauguration du stade Abdoulaye Wade, les influenceurs ont été accrédités pour la plupart par des autorités. Une situation qui a provoqué plusieurs polémiques au Sénégal.
Le journal l’OBS, dans un grand dossier, pose le débat en donnant la parole aux acteurs.
D’emblée, c’est l’artiste comédien Malaw Pikine qui se défend. « J’ai les mêmes capacités de diffusion que les journalistes et autant de mérites» dit-il dans les colonnes du journal. Selon lui, quand il publie un vidéo sur son compte snapchat, il a plus de 150.000 vues. «Donc, c’est normal qu’on nous sollicite lors des grands événements pour une bonne visibilité».
Malaw ajoute qu’il est en mesure de concurrencer la presse locale avec ses 300K followers. Il estime avoir plus d’audience que la plupart des médias traditionnels.
Une déclaration qui n’est pas très partagée par le journaliste Adama Sow. «Après la «Pawlishisation, des Médias, les autorités viennent d’amorcer une «Kharagnization et une «Ketcheupisation de la presse. Accréditer des «influenceurs» en leur remettant des badges «Presse» relève simplement d’une provocation et une gifle sur la joue gauche des professionnels des médias. Déjà, avec «Kharagne», les hautes autorités avaient fini de porter une baffe terrible à la joue droite des journalistes. Ce n’est que du sabotage et j’espère que les professionnels des médias réagiront à la hauteur de cette forfaiture, s’étrangle l’expert en Communication.
Pour le journaliste, «les autorités sénégalaises, comme la plupart des décideurs, nourrissent des fantasmes à propos des snapchateurs, tik-tokeurs… «Les autorités peuvent recourir, à coups de millions, aux influen-ceurs, mais elles n’ont pas le droit de leur accorder un statut que la loi ne leur accorde pas.C’est vraiment regrettable que les autorités sénégalaises soient devenues des complices d’une usurpation de fonction. C’est triste et inacceptable pour la presse nationale qui ne mérite pas cet affront. Ce qui s’est passé lors de l’inauguration du Stade Abdoulaye Wade, mardi dernier, relève d’un acte de sabotage. Aujourd’hui, la presse, qui patauge dans une galère inextricable envahie par des lobbies politiques et affairistes, n’avait pas besoin de ce
coup irrégulier et illégal.»
Interrogé par le journal sur la même question, Mamadou Ibra Kane, président du Conseil des diffuseurs et éditeurs de presse du Sénégal
(Cdeps) se veut clair.
Pour le président du Patronat de la presse, leur action ne peut s’inscrire que dans le cadre de la loi. «La loi dit que, pour couvrir les manifestations publiques, il faut être un journaliste, muni de la carte de presse professionnelle. C’est cette carte de presse professionnelle qui devra servir de laissez-passer pour les journalistes. Toutes les autres personnes qui couvrent les manifestations publiques sans cette carte de presse là, enfreignent la loi. Parce que, pour pouvoir couvrir un évènement, il faut
avoir une carte de presse professionnelle» dit-il.