Au Sénégal, la démission de Khadim Bâ plonge la SAR dans une zone de turbulences
6 mars 2020DIASS-INFOS : Après avoir été informé de l’impossibilité de la SAR de s’acquitter d’une facture de 40 milliards de francs CFA, Khadim Bâ a claqué la porte de son conseil d’administration, fustigeant la « mal gouvernance » de la Société africaine de raffinage.
Courant février, l’administrateur de la SAR et patron de la société de crédit-bail Locafrique, Khadim Bâ, a été informé de l’impossibilité de régler la totalité d’une facture de 40 milliards de F CFA (61 millions d’euros) devant permettre l’acquisition d’une cargaison de brut d’environ 950 000 barils.
Pourtant, une ligne de crédit de 250 millions d’euros a été mise à la disposition de la SAR afin de lui permettre d’assurer ses importations de pétrole brut pendant plus d’une année, écrit-il, dans sa lettre de démission datée du 24 février et adressée à Diène Faye, président du conseil d’administration de l’entreprise.
JE NE LAISSERAI PAS RUINER MA CRÉDIBILITÉ
Au total, ce sont cinq lignes de crédit, d’une valeur de 40 milliards de F CFA chacune, qui ont été ouvertes auprès des partenaires bancaires pour le compte de la SAR. Comme lors de son entrée en 2017 dans le capital de la SAR via le rachat des actions de Petroleum, Chemicals & Mining Company (PCMC), filiale du groupe saoudien Ben Laden, Khadim Ba fustige « la mal gouvernance » qui plombe l’entreprise.
Décision irrévocable
« La SAR produit moins qu’elle ne vend et détient un monopole sur le marché, donc elle ne peut pas avoir de difficultés financières ! Elle fait plutôt les frais d’un réel problème de gouvernance », explique-t-il à Jeune Afrique, évoquant même des « détournements». « Je ne peux plus continuer dans ces conditions-là, je ne cautionnerai jamais pareilles choses, il en va de ma responsabilité », assène-t-il.
Interrogée par Jeune Afrique, la direction générale de la SAR n’a pas souhaité apporter sa version des faits.
Jusqu’ici, les rencontres entre les ministères du Pétrole et des Énergies ; des Finances et du Budget et la direction de la SAR n’ont pas réussi à faire revenir le patron quinquagénaire sur sa décision. «Je suis actif dans le financement et ma crédibilité repose sur la confiance nouée avec les banques. Je ne laisserai pas ruiner cette crédibilité », martèle-t-il à Jeune Afrique.
Soutien des employés
Dans sa lettre de démission, Khadim Ba « souhaite l’annulation dans les meilleurs délais de la caution de 130 milliards de FCFA « personnellement souscrite » auprès des banques pour garantir l’utilisation de la ligne de crédit de 163 milliards de F CFA destinée à l’importation de pétrole brut pour la SAR.
Interrogé sur le devenir de ses 34 % de part dans le tour de table de la SAR, le jeune patron affirme imaginer difficilement « un éventuel investisseur les acquérir ». Pour rappel, l’acquisition des 34 % de Petroleum, Chemicals & Mining Company était assujettie au transfert à terme de 17 % (moyennant 70 millions d’euros) des 45 % détenus par l’agence gouvernementale Petrosen. Des divergences stratégiques sur l’avenir de la boîte opposant en 2018, Khadim Bâ à l’ancien ministre du Pétrole, Mansour Elimane Kane, avait alors retardé le processus.
Cela serait-il l’une des explications de cette nouvelle crise ? En tout état de cause, Khadim Bâ est certain qu’il s’achemine vers une confrontation avec la direction de la SAR.
Dans cette éventuelle bataille, il peut d’ores et déjà être certain de compter sur le soutien des employés de l’entreprise. En effet, à l’issue d’une assemblée générale tenue le 27 février, le collège des délégués a tenu à lui « témoigner toute sa reconnaissance des efforts fournis par Locafrique pour la pérennité et la stabilité de la SAR ».